Pourquoi tous les raccourcis mènent-ils aux Roms ?

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Dans un ouvrage à la militante luminosité, le collectif PEROU fait face à l’absurdité administrative et l’inhumanité procédurière. Un modèle de contre-pouvoir doublé d’un manuel de savoir-vivre / penser / gouverner / contruire.

Il y a des livres qui ne devraient jamais voir le jour. Maintenant, face à l’aberration humaine, la surenchère administrative, la dérive politicienne, la peur de l’étranger, surtout quand celui-ci revêt les atours du Rom, il y a des cas de force majeure.
Tout est parti d’un arrêté du maire de la ville de Ris-Orangis (département de l’Essonne, en bordure de Paris). Afin de dégager une communauté implantée « illisitement » sur un bout de terrain improbable, cerné par la nationale 7, sans eau ni électricité, un no man’s land impropre à l’habitation en somme, l’élu local s’est fendu d’un document placardé de 8 pages, 21 « VU » et 75 « CONSIDÉRANT », manière de montrer que le dossier avait été bossé de fond en comble et que, malheureusement, pour le bien de tous, il n’y avait pas moyen de faire autrement que d’expulser les familles ici implémentées. Des Roms, pour faire court.
Le PEROU, c’est partout
Dans l’idée de défendre ces habitants et « considérant qu’il est plausible de que tels événements puissent à nouveau survenir », le collectif Pérou a organisé une résistance. D’abord architecturale, notamment avec l’élévation d’une « ambassade (du PEROU donc) », puis par ce manifeste. Au niveau du name dropping, le casting est lourd, mais surtout concerné autour du bateleur textuel qu’est Sébastien Thiéry: les architectes Patrick Bouchain, Loïc Julienne ou Charlotte Cauwer, les philosophes Etienne Balibar, Michel Surya ou Jean-Paul Curnier, le paysagiste Gilles Clément, les écrivains Jean-Christophe Bailly ou Hélène Cixous. 35 salopards réunis pour le meilleur et pour le pire, parce que si Paris n’est pas le PEROU (Pôle d’exploration des ressources urbaines), la lourdeur administrative en devient à ce point caricaturale qu’il paraît nécessaire d’y apporter une réponse circonstanciée par l’absurde. Ces réponses sont ironiques mais documentées, incrédules mais humanisées, violentes mais légitimées. C’est un véritable manifeste de création littéraire au service des « nécessiteux ». Une enclave archi-textuelle, innovante, intelligente, entre ceux qui virent et ceux qui essaient de vivre, entre ceux qui votent l’expulsion et ceux qui luttent contre l’exclusion.
On l’a dit, ce livre ne devrait pas exister. Maintenant, une fois qu’on l’a lu et refermé, il permet de garder les yeux encore bien ouverts. (mp)

Considérant qu’il est plausible de que tels événements puissent à nouveau survenircollectif PEROU, Post-Editions, 318 p., www.post-editions.fr et www.perou-paris.org

9791092616026FS