Une mise en bières qui fait mousse

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Blonde, brune ou rousse, le choix n’est pas toujours facile. Surtout qu’on parle aussi de bière stout, ipa, ale ou pils en v.o. Deux guides sont là pour vous guider dans vos dégustations zythologiques.

Qu’est-ce que c’est ?
1. Une sorte de Bible monstrueuse et définitive qui devrait, à terme, en faire la référence du genre et l’équivalent du guide des vins du même éditeur. Au menu, on y trouve près de 800 bières, mais surtout de la française, département par département. Chaque brasserie y est présentée historiquement et chaque bière possède sa fiche de dégustation. Le travail est titanesque et permet de donner ses lettres de noblesse à un breuvage qui remonte tranquillement à Vercingétorix.
2. Un guide de randonnées absolument génial qui permet de coupler le plaisir de la marche à celui de déguster une bonne binch’ au terminus de la balade. Au catalogue, on y trouve près de 60 bières disséminées sur l’ensemble de la Suisse. Ici, et même si la bouteille houblonnée est le but de la visite, la description est avant tout topographique, métaphore d’un cheminement qui vous vide le corps avant de vous rafraîchir la tête.

Pour quoi on aime ?
1. Parce qu’il est une référence indispensable. Où qu’on soit sur le territoire français, on a ainsi l’assurance de pouvoir dénicher dans la moindre vallée, dans le plateau le plus désertique qui soit, un breuvage qui vous sauvera d’une quelconque bouillasse jaune pisse vendu en pack de 16 ou de 24. Dans le tas, on vous conseille vite fait sous le coude l’« Avalanche » de la brasserie du Galibier et la « Sorachi Ace Bitter » du Mont-Salève.
2. Parce qu’on y joint l’utile à l’agréable. Où qu’on se balade sur le territoire helvétique, on a une rando à portée de main et l’assurance d’un final en beauté. Le catalogue y est plus raisonné, mais cela donne à la Suisse un goût du bon vivre qui permet de festoyer au-delà des querelles linguistiques ou politiques. Dans le tas, on vous conseille l’inaltérable « Salamandre » de la Brasserie des Franches-Montagnes et la « Pépite » du Docteur Gab’s.

Qu’est-ce qui fait la différence ?
1. Une démarche encyclopédique par une « fille de l’orge » diplômée et reconnue. La première partie intitulé « Connaître les bières » permet de répondre à toutes les questions qu’on pourrait se poser sur la question (type de bières et d’ingrédients, durée de conservation, étapes de fabrication…) et de devenir ainsi un incollable zythologue.
2. Une approche graphique par une guide au Club Alpin Suisse qui soigne autant le contenu que le contenant. Chaque randobière est ainsi présentée sour la forme d’un topoguide aussi visuel que factuel et chaque bière y est représentée par son étiquette iconique. La présentation aérée fait que chaque bière semble valoir son pesant de cacahouètes et la balade y menant. (mp)
Le guide Hachette des bières, Elisabeth Pierre, éd. Hachette, 360 p, www.hachette-pratique.com & www.lafilledelorge.com
Randos bière en Suisse, Monica Saxer, éd. Helvetiq, 275 p., www.helvetiq.ch

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FuittFuitt ou l’art de voir le monde en chaussettes

critiques

bülbooks propose des guides pratiques détournés. Son premier opus est un pas de danse pensé comme un coup de dés, voire comme un battement d’ailes de papillon.

On va commencer cette chronique en citant la phrase de Bruce Lee trônant en couverture : « Il n’y a pas un style, mais plein de styles dans ma façon d’aborder le Kung-Fu ! ». De même, il y a un nombre d’entrées certain dans cet opuscule à la gloire du FuittFuitt, tant l’objet est une vraie réussite éditoriale : une poignée de textes pas trop longs permettant de cerner le pas de danse en question ; un double flip book fonctionnant autant de gauche à droite que de droite à gauche ; un déroulé image par image narrant l’ensemble du processus gestuel pour être FuittFuitt compatible ; une tranche qui se pare d’une pattern hyper raccord d’un point de vue étymologique ; des liens et des renvois fléchés qui permettent au livre de s’auto-référencer et de créer ainsi une sorte de pont entre l’exigence du papier et la volatilité du nécessaire nuage de tags …
Un gars, une fille
Le FuittFuitt ? Un pas de danse groovy inventé par la Cie 7273 et qui se situerait dans l’entre-mouvement ou, pour mieux dire, qui offrirait un élément de transition entre deux mouvements. A pratiquer en chaussettes de préférence, parce que cela glisse mieux, il est un agrégat de coolitude destiné à fluidifier une zone parfois délicate à passer parce qu’impensée au départ. Plutôt qu’une fuite en avant, il est un instant de grâce, de ceux qui vous aideront à vous sentir moins patauds pour les gars, moins godiches pour les filles, plus « à l’aise, Blaise ! » pour l’ensemble de l’humanité.
Un livre, un guide, une manière de vivre
Premier guide détourné des éditions bülbooks, Multi styles FuittFuitt est un objet multiple à l’esthétique jusqu’au boutiste et à l’ornementation léchée. Un manuel de danse, mais aussi un guide de savoir-bouger / penser, car le mouvement, s’il a été dansé un peu partout, jusqu’à Petra et Ramallah, se veut plus large que ça. Si le FuittFuitt se danse seul, en couple ou en groupe, le livre lui se découvre morceau par morceau. Comme un puzzle dont chaque pièce supplémentaire permet d’en aborder la construction en une approche par cercles concentriques. Pour mieux, au final, se retrouver au centre de la piste. (mp)
Multi styles FuittFuitt, Laurence Yadi et Nicolas Cantillon, bülbooks, 72 p., www.bulbooks.ch et cie7273.com

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Number one – Le 1, ou comment combattre le numérique

critiques

Une feuille aux multiples ramifications et un seul sujet d’actualité par numéro. Le 1 marque sa différence et démontre que les idées et le politique doivent réinvestir les bistrots et kiosques à journaux.

Il suffit d’évoquer son nom pour que quelques associations surgissent, au gré des intérêts des uns et des autres : Eric Fottorino. Ancien patron du Monde, écrivain de la mémoire (du père surtout) ou encore féru cycliste et admirateur du Tour de France, chacun a « son Fottorino ».
Et le voilà qui produit un hebdomadaire pour le moins singulier, Le 1, au format papier pour aller à contre-courant et prouver que oui, il est encore possible de s’attabler au bistrot pour déployer un journal et gêner un peu son voisin. L’objet se présente de la façon suivante : une feuille immense qui, grâce à un pliage en trois, trouve un format agréable dans un premier temps, conventionnel au premier dépliage, puis franchement encombrant au troisième. Pour ceux d’entre vous qui auraient connu le syllabus à ses débuts, une larme de nostalgie s’impose… Pour rappel, c’est dans les cuisines des rédacteurs que le syllabus papier était plié à la règle, un par un, des heures durant, avant d’être transporté dans des sacs Migros et distribué dans les lieux culturels de la ville de Genève.
Une feuille remue-méninges
La feuille se veut « indépendante, respectueuse de l’environnement et vierge de toute publicité », d’où un cruel besoin de lecteurs. Et quid des contenus ? Prenons le n°33 consacré à la consommation carnivore et à l’usage que fait l’être humain de ses semblables dépourvus de langage. Le sommaire nous avertit : ça va pas être drôle de se pencher sur l’élevage de masse, sur l’alimentation des porcs, leur abattage et j’en passe. Par contre, ça va nous remuer les méninges et nous contraindre à quitter ce conformisme petit-bourgeois qui nous fait hurler au scandale dans un premier temps. puis oublier aussi sec ce que nous venons de lire ou de voir sur nos écrans. Notamment cet article de Sylvain Tesson, prix Médicis essai, qui, dans une nouvelle de 2009 assène à la première personne : « Nous avions inventé un élevage ou l’animal est l’ennemi. Aujourd’hui, l’éleveur abaisse. Nous avons rompu l’équilibre, trahi le lien charnel. » Et de répéter : « Je ne veux plus entendre leurs cris (ceux des porcs). Je ne peux plus les supporter. ». C’est à vous ficher la chair de poule et à vous demander comment, demain, vous allez cuisiner votre poulet pas trop fermier.
Une heure top chrono
Vous l’aurez compris, Le 1 se veut militant, œuvrant contre la pensée molle, faisant tomber quelques œillères que nous ne rechignons pas à porter pour rendre la vie moderne supportable. Il s’articule autour d’un seul sujet éclairé par différents intervenants (journalistes, écrivains, dessinateurs, etc.) et devrait être lu de pied en cap en moins d’une heure. Et s’il est certain que Fottorino dispose d’un réseau titanesque, il n’est pas dit que ce défi-là soit si simple à relever. Ce qui mérite un coup de chapeau et un petit abonnement de soutien ! (sbr)

Journal Le 1, tous les mercredis, http://le1hebdo.fr/

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